lundi 5 novembre 2012

Debord à l’université



L’université s’intéresse de plus en plus aux situationnistes et à Debord — surtout à Debord, d’ailleurs. On se demande bien pourquoi ? C’est ainsi, par exemple, qu’en 2007 le philosophe Jacob Rogozinski a organisé à Strasbourg un colloque qui lui était consacré. Les communications des différents participants — dont le « flamboyant » Ciret — ont été réunies dans un ouvrage intitulé comme il se doit : Dérives pour Guy Debord — dont il n’y a évidemment pas grand-chose à retenir ; si ce n’est celle de Jörn Etzold : Guy Debord et la mélancolie révolutionnaire.



Plus récemment, le livre récent de Patrick Marcolini : Le Mouvement situationniste, Une histoire intellectuelle, qui était originellement une thèse de philosophie, se révèle pourtant être le meilleur ouvrage qui soit paru sur le sujet. On notera que dans son intitulé l’épithète « situationniste » est là pour qualifier un « mouvement » et que le nom de Debord n’est pas placé en tête de gondole. Le mérite de ce livre (très documenté) ne réside cependant pas dans sa relation de l’histoire situationniste elle-même, mais dans le fait qu’il élargit le champ en replaçant celle-ci dans le cours d’un mouvement plus général ; et plus particulièrement par la place qu’il accorde aux post-situationnistes — Marcolini pousse l’audace jusqu’à citer le nom (honni) de Voyer.



De la thèse d’Eric Brun : Guy Debord et l’Internationale situationniste, Sociologie d’une avant-garde « totale » dont il va être question, disons d’emblé que, malgré l’impressionnante documentation qu’elle met en œuvre — c’est d’ailleurs celle-ci qui en fait le principal intérêt —, elle se situe un cran en-dessous. Ce n’est pas faute d’examiner son objet sous tous les angles possibles pour essayer d’en présenter l’image la plus complète qui soit. C’est précisément le choix de privilégier un certain objet : l’I.S. comme création debordienne. Ce n’est donc pas non plus le lourd appareillage bourdieusien qui est en cause.



C’est ce que nous allons montrer.

2 commentaires:

  1. "Dérives pour Guy Debord" est effectivement lamentable. La thèse de Marcolini ne m'a guère intéressé. Celle de Brun - que j'ai presque fini de lire - est de loin celle qui a le plus de contenu et donc qui mérite d'être lue. Mais qu'en faire de toute cette documentation accumulée ? Le part pris bourdieusien est assez rebutant et finit par être tautologique. Il y a aussi beaucoup d'erreurs - sans parler des fautes d'orthographes.
    Personnellement je serais assez d'accord avec l'idée que l'IS, pour le meilleur et pour le pire, c'est Debord. Même si seul il n'aurait pu mener à bien ce projet - qui du reste a été assez changeant - c'est le seul qui a géré la boutique du début jusqu'à la fin et qui a impulsé les changements d'orientation.
    Il y a aussi à l'Université un mémoire de DEA de Pierre-Emmanuel FINZI sur le cinéma de Debord qui est pas mal du tout.
    J'ai également lu la thèse de Trudel qui est sans intérêt.

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  2. Je suis actuellement en préparation de ma soutenance de mémoire d'un master en arts du spectacle. Vous apprécierez l'ironie. Je le mettrai probablement en ligne bientôt. Quoi qu'il en soit, l'appropriation de Debord dans la pensée me semble parfaitement cohérente avec ses prises de position à la fin de sa vie. Quand le spectacle tend à tout désintégrer, à enfermer et même à faire disparaître ce qui le contredit, les nécessités changent, et la discrétion salvatrice se renverse en présence saboteuse. Je suis cependant d'accord sur la faiblesse de Dérives pour Guy Debord. On peut facilement ranger les livres de Bourseiller et de Cécile Guilbert dans la même catégorie. La profusion est certes paradoxale, mais ce paradoxe est inhérent et essentiel à Debord. La question mérite cependant d'être soulevée, sur les termes et les manières. On s'étonne tout de même plus des expositions sur le "situationnisme" (sic), que des thèses universitaires qui y voient une possibilité de penser autre.

    Au plaisir de vous lire encore,
    un lecteur régulier,
    jeune rien du tout pour qui l'émancipation est encore possible et pas toujours raillée par les quolibets des kellipot

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