jeudi 20 décembre 2012

Guy Debord et l’Internationale situationniste – Sociologie d’une avant-garde « totale » / Commentaire 23



Nous sommes arrivés, tant bien que mal, à la fin du travail d’Eric Brun. Nous pouvons à présent revenir au début — et aux débuts de l’I.S. aussi bien. Interrogé sur Debord en 1996 sur France Culture, Marc’ O. disait : « Je l’ai rencontré à Cannes ; je crois que c’était en 1950-51. J’étais à Cannes pour présenté le film d’Isou – parce qu’Isou n’était pas là. Le film étai présenté dans la grande salle par Cocteau ; et j’étais là, et Debord qui était encore lycéen est venu me voir parce qu’il avait entendu parler des lettristes. Il était très féru, comme ça, de littérature d’avant-garde, Breton, etc. Et c’est là où je l’ai rencontré, où je l’ai vu pour la première fois. Et c’était l’année où il devait passer son bac, voilà. D’ailleurs, ce qui est très intéressant si on veut parler de Debord, c’est de parler… Je pense, c’est très important de connaître quelqu’un au début ; parce que, comme on dit dans la théorie du chaos, les conditions initiales sont là – et bien sûr ; après il a beaucoup évolué, dans sa pensée, dans ce qu’il voulait faire : mais déjà y avait quelque chose qui était là, complètement spécifique à lui, et qui était intéressant. »

De : « Nous irons plus loin sans avancer jamais. » à « In girum imus nocte et consumumimur igni », on retrouve chez Debord cette même image du cercle, qu’il faut parcourir, inlassablement — jusqu’au bout : mais où se trouve la fin d’un cercle ? Lorsqu’on a fini par se persuader que la boucle est bouclée, pour continuer à « avancer », il faut passer à un autre cercle. Mais, sort-on jamais du cercle de l’Enfer ? (« C’est aujourd’hui, demain, demain, et puis demain. “Je marque mon jeton à ce jeu de la vie où nous perdons coup sur coup et où le diable, pour en finir, rafle joueurs, dés, et tapis vert.” »).

Le cercle des avant-gardes s’est refermé avec (et sur) l’I.S. À ceux qui veulent s’y maintenir et le parcourir encore, il ne reste que la répétition, ad nauseam, du chemin qui a déjà été parcouru par d’autres — et l’exploitation, plus ou moins roublarde, des fragments qui jonchent les bas-côtés. (Un jour Marcel Duchamp est parti sur son grand cheval : Marcel, pourquoi les as-tu abandonné ?)

(À suivre)

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