lundi 8 avril 2013

Lectures – Le Secret c’est de tout dire !



En 1983 l’imprimeur véronais Mariano Mardersteig livrait les premiers exemplaire de Il segreto è dirlo et « La Repubblica », l’un des quotidiens les plus lus en Italie, consacrait un long article aux aventures d’un étrange client de mon étude, l’ouvrier Stabile Fioravante. L’enquête était signée par Giorgio Bocca, le mieux payé parmi les journalistes prêts à écrire sur n’importe quel sujet, éventuellement sur commande. Stabile Fioravante n’avait pas tué sa femme à coups de marteau et n’était pas non plus le dernier fiancé de Caroline de Monaco, mais il n’en avait pas moins mérité les honneurs de la presse en gagnant, en moins de vingt mois, dix-sept procès contre dix-sept sociétés différentes dont il avait réussi à se faire licencier. / Les juges lui accordèrent une indemnité globale de 700 000 NF d’aujourd’hui. Non content de son succès, Fioravante menaçait avec insolence de continuer sur cette voie, en incitant les autres à en faire autant. / Cela se passait en Italie au moment où la révolte prolétarienne, commencée en sourdine dans les années 1966 et 1967, semblait sans issue. Depuis plus de seize ans elle renaissait chaque fois sous des formes différentes, dominant habilement la répression et ne cédant jamais à la tentation d’accepter de sournoises offres de paix. Les jeunes volaient vers les bureaux d’embauche pour y demander n’importe quel travail, très pressés de « foutre le bordel » et de récupérer de jolies sommes en échange de leur départ. / Il serait ridicule de s’interroger longuement pour savoir si ce banditisme légal doit être considéré comme subversif. Il fut indiscutablement scandaleux et les organisations syndicales furent bien obligées de le tolérer, en le dissimilant hypocritement, dans l’espoir de le voir cesser spontanément. L’exploitation éhontée des lois alimentait des comportement radicaux et constituait une véritable farce aux dépens de ceux qui étaient bien obligés de les respecter, puisque c’était eux qui les avaient crées et imposées. C’est dans ce climat que furent conçues les joyeuses et désinvoltes aventures de Salvatore Messana ; et il est impossible de bien les comprendre sans leur accorder la réalité, sinon le réalisme, dans lesquelles elles baignent. Le livre paru sans nom d’auteur, pour éviter les confusions avec  les bandes de petits arrivistes, leurs chroniques ambiguës et sournoises des luttes italiennes et avec leut désir évident d’obtenir un poste minable. / Aujourd’hui où tout paraît brusquement et inexplicablement calme, je peux enfin signer. / Gianni Giovannelli

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La traduction du livre dont on vient de lire la Préface à l’édition française est parue en 1989 aux éditions Allia. On s’est évidemment interrogé sur la véritable identité de l’auteur. Debord y a reconnu Sanguinetti : « Connaissais-tu ce livre récent de Gianfranco ? Il y a des choses plaisantes. », écrivait-il a Charles Vincent en 1991 (Correspondance, volume 7). Une Note précise : « Supercherie mêlant, sur le mode picaresque, des faits réels aux “aventures” d’un indicateurs avéré. » — ce qui est évidemment une saloperie puisque visant indirectement Giovannelli, c’est-à-dire Sanguinetti si c’est bien lui l’auteur du livre, comme le pense Debord.

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