lundi 16 septembre 2013

Sur la ligne du risque (encore)



Revenons sur la Ligne de risque. Plus particulièrement sur Yannick Haenel qui est sur tous les fronts en cette rentrée littéraire. Il a les honneurs du Monde et de Libération avec, dans chacun, un article (élogieux) consacré à son dernier livre et un entretien ; de la télévision avec La grande librairie. (Cela nous aura permis d’apprendre qu’il se « ressource » en Alsace et qu’il vit en Italie.) Il participe aux rencontres de La Bibliothèque Idéale de Strasbourg dont l’intitulé est tout un programme : Libre et rebelle. Parmi ces rebelles en liberté, citons en outre : Julia Kristeva qui nous invite à Oser l’humanité aujourd’hui ; Laure Adler qui [a] besoin de vivre dans le risque ; André Comte-Sponville qui vient déballer Sa bibliothèque philosophique idéale ; et Raphaël Enthoven. En ce qui concerne Yannick Haenel, il dissertera de Ce que peut la littérature quand la vie se brise en compagnie de Jean Hatzfeld et Pascal Manoukian.

Autant dire que pour Yannick Haenel la Ligne de risque s’est transformée en ligne de chance — si l’on peut dire. Il est bien normal qu’il en profite. Cependant, cela n’est pas sans poser quelques questions quant à la ligne générale dont se revendique ces rebelles. La principale étant pourquoi et comment continuer à revendiquer le patronage de Sollers — c’est peut-être un « vieux rebelle » qui a su rester jeune comme l’affirme François Meyronnis ; mais c’est surtout un vieux cabotin qui n’est plus à une pantalonnade prêt. (Yannick Heanel aurait dû écouter Louis-René des Forêts qui lui disait qu’il perdait son temps en lisant Tel Quel.) Évidemment il est tout à fait confortable, même pour des rebelles, d’avoir un éditeur qui publie votre revue et vos livres sans mégoter. Et puis Debord lui-même qui s’auto-éditait avant Lebovici et Gallimard n’avait-il pas des mécènes qui le finançaient lui et l’I.S. ?. Alors, pourquoi faire la fine bouche ? Surtout quand on est engagé dans une entreprise littéraire « explosive » et que l’on rencontre un éditeur qui n’a pas peur de la « dynamite ». Voilà ce que dit Yannick Haenel à ce propos : « Je pense effectivement qu’il n’y a rien à attendre des gens du milieu littéraire. On n’en a d’ailleurs jamais rien attendu, et on avait choisi délibérément François [Meyronnis] et moi, d’aller voir la seul personne qui nous semblait vivante : Philippe Sollers. À cause de Tel Quel, nous pensions que la force insurrectionnelle qu’il avait eue en lui et qui l’avait amené à être le dernier moment des avant-gardes dans la littérature française, prouvait qu’il y avait encore quelque chose à faire avec quelqu’un comme lui. […] Mais à part lui, j’avoue fuir comme la peste ces gens-là, qui jouissent de leur propre ruine, évoluent dans les décombres et me répugnent. »

Voilà qui a le mérite d’être clair. Mais ils ont certainement tort de mettre Philippe Sollers « à part » Encore en effort et ils pourraient perdre un éditeur (envahissant) et gagner la liberté. C’est tout le mal qu’on leurs souhaite.

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