vendredi 27 décembre 2013

Surréalisme et situationnistes au rendez-vous des avant-gardes – Commentaire / 5



Il faut revenir sur ce mot d’ordre des Conseils : « Les Conseils ouvriers, partout. », proclamait une des Directives de Debord — qui resta sans suite comme les autres. « La révolution des conseils n’a pas répondu à l’appel de Mai 68 ? À qui la faute si les exploités n’ont pas su entendre les trois coups ! On leur avait pourtant demandé de rester à l’écoute ! » peut ironiser Louis Janover. De fait les appels enflammés lancés par le Conseil pour le maintien des occupations (C.M.D.O.) — le très situationniste Conseil de la rue d’Ulm — feront l’effet d’un pétard mouillé. Dans l’Histoire désinvolte du situationnisme, j’écrivais : « C’est au C.M.D.O. que l’on doit ces « belles » affiches réalisées par les grévistes des imprimeries (occupées), que l’on retrouvera plus tard dans les musées : FIN DE L’UNIVERSITÉ ; ABOLITION DE LA SOCIÉTÉ DE CLASSE ; OCCUPATIONS DES USINES ; LE POUVOIR AUX CONSEILS DE TRAVAILLEURS etc. ; et qui font la fierté des collectionneurs de reliques révolutionnaires à bon marché. Le C.M.D.O. qui était allé « au bout de son action révolutionnaire », selon le stratège situ, n’avait donc plus qu’à disparaître ; ce qu’il fit sans se faire prier, le 15 juin, en s’auto-dissolvant — on n’est jamais si bien servi que par soi-même — dans la « vague » révolutionnaire — qui, malheureusement, refluait : c’est ainsi qu’ils se retrouvèrent sur le sable (des rues dépavées). » Mais la mode « conseilliste » était lancée qui perdura dans les années qui suivirent*.

Pour en finir avec les Conseils, citons la remarque de Jérôme Duwa dans Surréalistes et situationnistes, Vies parallèles : « Dans leur revendication en 1965 d’un “écart absolu” par rapport à la société les surréalistes tentent sous la forme d’une exposition répondant à des principes nouveaux de soustraire l’art à la logique de la marchandise. Si cette tentative est désespérée, elle ne réclame certainement pas moins de talent à s’illusionner que celle consistant à croire à la victoire des  conseils ouvriers. » On pourrait ajouter qu’avant de croire à leur victoire encore fallait-ils qu’ils existassent ailleurs que dans la subjectivité radicalement abusée des situationnistes.

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* Je rappellerai pour mémoire le Conseil du Palais qui occupa, au printemps de l’année 1976, les bâtiments du Palais Universitaire de Strasbourg qui, sur son fronton arborait le fier : LUTTER ET VAINCRE en place du banal : LITTERIS ET PATRIAE.


(À suivre)

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